Au son des marches grand-ducales
Musique, dynastie et identité au LuxembourgÀ l’occasion de l’avènement au trône de S.A.R. le Grand-Duc Guillaume, les Amis de la Musique Militaire ont organisé un concours de composition destiné à « faire honneur et témoigner leur révérence à l’actuel Grand-Duc héritier et futur chef d’État ».
Le but était de susciter une nouvelle marche portant le nom du Grand-Duc Guillaume. Le concours était ouvert aux compositeurs de nationalité luxembourgeoise et la finale a eu lieu le 19 septembre 2025, sous forme d’un concert public, à Hesperange. C’est la marche composée par Georges Sadeler qui a remporté le prix.
Ce concours n’en est qu’à sa deuxième édition, la première ayant été organisée en 2000 lors de l’avènement au trône de S.A.R. le Grand-Duc Henri.
La Marche Grand-Duc Henri, composée par Julien Hoffmann (1924–2007), remporta le 1er prix du concours de composition lancé en 2000 par les Amis de la Musique Militaire à l’occasion de l’accession au trône de S.A.R. Grand-Duc Henri le 7 octobre 2000. La première présentation publique eut lieu le jour du couronnement, par la Musique Militaire.
Même si l’annonce du Grand-Duc se fait toujours par le Wilhelmus, les marches spécialement composées pour les membres de la famille grand-ducale, et portant leurs noms, accompagnent également les cérémonies militaires, sans toutefois revêtir un caractère officiel. Il s’agit davantage d’hommages musicaux symboliques que de pièces protocolaires d’exécution obligatoire.
Au-delà de leur fonction cérémonielle, ces marches et autres compositions dédiées aux souverains luxembourgeois constituent une partie intégrante du patrimoine culturel du pays.
L’apparition de ce type de compositions coïncide avec l’accession au trône du Grand-Duc Adolphe de Nassau-Weilburg (1890–1905), dont la dynastie fut perçue comme véritablement nationale et permit ainsi aux Luxembourgeois de s’identifier à une famille princière.
Le Herzog-Adolph-Marsch de Gustav Kahnt (1848–1923), chef de la musique militaire entre 1881 et 1909, a connu sa création mondiale en juin 1890 en version pour orchestre d’harmonie, cinq mois avant l’instauration officielle d’Adolphe en tant que Grand-Duc le 23 novembre 1890. La version pour piano ne paraît qu’en mars 1891, chez l’éditeur de musique Guillaume Stomps (1855–1927). Quelques années plus tard, Edmond Patzké, chef et réformateur de la musique militaire entre 1899 et 1903, compose la Marche Grand-Duc Adolphe et rend ainsi révérence à son souverain.
En 1905, c’est de nouveau Gustav Kahnt qui compose un Grossherzog-Wilhelm-Marsch, dont la création mondiale a eu lieu en février, alors que l’accession au trône du Grand-Duc Guillaume IV ne se fait que le 22 novembre 1905. De nouveau, la version pour piano est publiée chez Stomps en juillet 1906.
Bien que la majorité de ces œuvres soient des marches, adaptées à l’exécution par la musique militaire, cela ne constitue pas une règle absolue. En effet, pour l’ascension au trône de la Grande-Duchesse Marie-Adelaïde en 1912, Charles Günther (1872–1942), directeur de musique à Esch-sur-Alzette, compose la Marie-Adelheid Gavotte. En même temps, Pierre Pütz (1849–1913), compositeur et fabricant d’instruments de musique, compose une fantaisie pour harmonie et fanfare au nom de la Grande-Duchesse. Enfin, le chef d’orchestre suisse-allemand Max Kaempfert (1871–1941), ami personnel d’Edmond Patzké et lié au Luxembourg à cette époque, compose la Marche Grande-Duchesse Marie-Adelaïde dont la plus ancienne interprétation par la Musique Militaire remonte à 1914.
La Grande-Duchesse Marie-Adelaïde, souveraine devenue impopulaire en raison de son attitude jugée pro-allemande durant la Première Guerre mondiale, abdique en faveur de sa sœur, la Grande-Duchesse Charlotte en 1919. A cette occasion, Fernand Mertens compose une marche de même nom, publiée chez l’éditeur Linden & Hansen en 1920.
La Grande-Duchesse Charlotte ainsi que son fils le Grand-Duc Jean sont porteurs de sympathies pour leur engagement envers le peuple luxembourgeois durant la Seconde Guerre Mondiale.
C’est pourquoi leurs Altesses Royales font l’objet de diverses dédicaces et pièces de musique évoquant la liberté, la patrie, l’espoir et la conduite des souverains en tant que « père ou mère de famille », comme en témoigne la pièce Ons Mama Charlotte de Robert Henx (1916–2002), L’Alliance : Marche Symbolique Belgo-Luxembourgeoise de Francis Koster (1887–1980) à l’occasion du mariage du Prince Jean avec la Princesse Joséphine-Charlotte, ou bien encore l’hymne Patriae fideles (1943) de Louis Petit, dédiée à la Grande-Duchesse Charlotte, et la cantate Ons Heemecht, de Pierre Nimax sen., réalisée en 2009 en honneur de Grand-Duc Jean.
En résumé, les motifs qui conduisent à la composition d’une marche sont multiples : commémorer un avènement, rendre hommage au souverain ou exprimer une fidélité symbolique. Ces pièces, souvent liées à des moments-clés de l’histoire nationale, constituent aujourd’hui un corpus précieux conservé dans les collections du Cedom, garantissant ainsi leur transmission aux générations futures.
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