Hommage à Michel Piccoli
Voici une sélection de films de l’immense acteur de cinéma et de théâtre, producteur et réalisateur, Michel Piccoli qui est mort le 12 mai 2020, à l’âge de 94 ans.
Habemus papam
di Nanni Moretti ; soggetto e sceneggiatura Nanni Moretti, Francesco Piccolo, Federica Pontremoli
« Après la mort du pape, le Conclave se réunit afin d’élire son successeur. Plusieurs votes sont nécessaires avant que ne s’élève la fumée blanche. Enfin, un cardinal est élu ! Mais les fidèles massés sur la place Saint-Pierre attendent en vain l’apparition au balcon du nouveau souverain pontife. Ce dernier ne semble pas prêt à supporter le poids d’une telle responsabilité. Angoisse? Dépression? Peur de ne pas se sentir à la hauteur ? Le monde entier est bientôt en proie à l’inquiétude tandis qu’au Vatican, on cherche des solutions pour surmonter la crise... Nanni Moretti se surpasse avec cette fable tragi-comique qui lui permet d’aborder l’univers ecclésiastique vingt-cinq ans après La messe est finie. Dès les premières séquences, un humour acerbe désamorce le drame pressenti et le cinéaste gagne le pari de captiver sur un sujet plutôt casse-gueule à priori. Moins ouvertement polémique que Le Caïman qui évoquait les frasques de Berlusconi, Habemus papam n’en est pas moins réjouissant, par ses saynètes satiriques et son ton pince-sans-rire : il faut voir Sa Sainteté sombrer dans la névrose et la régression infantile, aidée par un psychanalyste athée et volubile (Moretti himself), pour apprécier la verve du cinéaste, qui propose la plus subtile peinture religieuse depuis Le sourire de ma mère de Bellochio. Moretti réussit alors ce subtil mélange de réalisme documentaire et d’étrangeté irréaliste. Quant à Michel Piccoli, non doublé et bouleversant, il trouve son plus beau rôle depuis des années. »
Le mépris
de Jean-Luc Godard ; d'après le roman d'Alberto Moravia
« Les années 1960 auront véritablement marqué le début de la consécration de Piccoli. Il s’impose dans Le Mépris (1963), de Jean-Luc Godard. Il y joue un scénariste veule, que bat subitement froid sa femme, interprétée par Brigitte Bardot, et révèle à cette occasion sa capacité à interpréter des personnages tout en fêlures. Le Mépris sera en parti une réflexion sur le cinéma et maniera la mise en abyme. Deux histoires s’entremêlent et se toisent tout le long du film, l’une tient du roman (adaptation du livre éponyme d’Alberto Moravia), l’autre davantage de l’essai. La première histoire est celle d’un couple dont les liens se sont effondrés ou plutôt ont muté en une seconde, à l’occasion d’une méprise. L’autre propos est celui de la transformation du cinéma, son passage du classicisme (incarné par Fritz Lang) au modernisme symbolisé par Le Mépris lui-même, le cinéma en train de se faire. »
Les choses de la vie
réal. par Claude Sautet ; adapt. Paul Guimard, Jean-Loup Dabadie, Claude Sautet, Paul Guimard ; d'après le roman de Paul Guimard ; dialogue Jean-Loup Dabadie
« Au volant de sa voiture, Pierre, architecte d’une quarantaine d’années, est victime d’un accident. Éjecté du véhicule, il gît inconscient sur l’herbe au bord de la route. Il se remémore son passé, sa vie avec Hélène, une jeune femme qu’il voulait quitter, sa femme Catherine et son fils.
Sautet devient dès ce film le peintre de la moyenne bourgeoisie de son époque. Pierre est l’archétype du cadre supérieur coulant une existence professionnelle sereine, en cette fin des Trente Glorieuses. Son intégrité d’architecte face à des promoteurs véreux mais aussi sa relative insouciance, un projet important ne devant pas empiéter sur ses vacances d’été, donnent des pistes quant à sa personnalité publique et au contexte de ce début des années 70. On est dans l’optimisme de l’ère pompidolienne, bien que cette sérénité soit somme toute relative, la vie privée de Pierre étant révélatrice de la fragilité croissante des liens conjugaux et familiaux
Les choses de la vie obtint le Prix Louis Delluc, connut un grand succès public et marqua un tournant dans la carrière de ses deux interprètes à qui Sautet fera de nouveau appel. Michel Piccoli, sobre et puissant, devint, avec Montand, l’acteur vedette le plus important de la période. »
Belle de jour
réal. par Luis Buñuel ; adaptation et dialogue Luis Buñuel et Jean-Claude Carrière ; d'après le roman de Joseph Kessel
« Jeune épouse d’un interne des hôpitaux de Paris, Séverine aime son mari mais n’est pas attirée physiquement par lui, préférant ses fantasmes à tendance masochistes. Elle va même aller se prostituer chez Madame Anaïs, une petite maison close, pour chercher un équilibre… En adaptant le roman de Joseph Kessel Belle de jour (publié en 1929), Luis Buñuel et Jean-Claude Carrière étaient intéressés plus par la possibilité de mettre en images les rêveries diurnes de son héroïne que par les aspects mélodramatiques du livre. Belle de jour est ainsi un film qui mêle étroitement réalité et imaginaire, Buñuel effaçant habilement la limite qui les sépare et instaurant le doute. La réalité et l’imaginaire ne feraient-ils qu’un ? La fin est admirable car elle peut être interprétée de deux façons différentes, l’une d’entre elles changeant notre vision sur tout le film qui vient de se dérouler sous nos yeux. »
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